13/11/2007
Retour des païëns sur le mont Olympe
Cela a pris presque 2000 ans, mais ceux qui adorent les 12 dieux de la Grèce antique ont finalement triomphé. La cour d'Athènes a ordonné la levée de l’interdiction de culte à Zeus, Héra, Athéna, Hermès et autres divinités des cultes anciens, ouvrant ainsi la voie à un retour des païens sur le Mont Olympe.
LES DIEUX DE L'OLYMPE, DE RETOUR A ATHENES
Article de presse - le figaro.fr
« ZEUS tout-puissant et Gaïa, nous implorons votre protection. Ô, toi Héra, reine de tout, épouse heureuse de Zeus, qui procure aux hommes la satisfaction de l'âme... accepte nos prières avec joie ! » A midi, le 21 janvier, une étrange cérémonie commence au coeur d'Athènes, sous les colonnes du temple de Zeus. Drapés dans des chlamydes et des himations, ces tuniques blanches et gilets portés dans la Grèce antique, chaussés de sandales, armés d'épées d'un autre temps, la tête couronnée de lauriers, des hommes et des femmes s'avancent en procession, au rythme des danses de Dionysos, chantant des hymnes orphiques en grec ancien. Quand chacun a pris sa place, une femme portant un encensoir entame un rituel en l'honneur de la déesse Héra, protectrice du foyer.
Nous ne sommes pas en plein tournage d'un spot publicitaire pour touristes, ni d'un quelconque péplum. Nous assistons à une première : la célébration d'un rituel d'adoration des dieux de l'Olympe, en dépit de l'interdiction du ministère de la Culture de se livrer à pareille manifestation sur un site archéologique. La cérémonie païenne sera interrompue par les forces de l'ordre. Mais ses initiateurs ont bien l'intention de récidiver, dimanche, sur le site, cette fois, du temple d'Artémis.
« Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement et l'Église nous persécutent, s'insurge Doreta Peppa, la présidente de l'association Ellinaïs. Sur l'Acropole, le Parthénon, temple de la déesse Athéna, est visité par des touristes en bikini qui pique-niquent assis sur les ruines sans que les autorités s'en offusquent. Mais nous, on nous interdit de brûler de l'encens et de revêtir des tuniques ! Nous ne faisons pas de sacrifices d'animaux ou d'êtres humains. Nos offrandes sont symboliques : de l'eau et du miel ! »
Les membres de l'association Ellinaïs se battent pour réhabiliter les pratiques religieuses de la Grèce antique. Ils sont ingénieurs, mathématiciens, professeurs de lettres, historiens, médecins ou avocats et pour eux, Zeus, Héra, Apollon, Hermès, Athéna et les autres dieux de l'Olympe sont les guides de l'humanité « comme ils l'étaient pour les philosophes grecs, la fierté de notre pays. Ils savaient qu'il existait onze planètes solaires et connaissaient le système lunaire sans avoir jamais quitté Athènes. Pourquoi parle-t-on de mythologie alors que les textes font foi ? » Doreta Peppa argumente sans se lasser : « Nos fidèles sont en perpétuelle recherche du savoir. Cela gêne l'Église de Grèce, qui fait pression sur le gouvernement pour nous empêcher d'exister. »
S'il s'y apparente, ce néopaganisme n'est pas interdit juridiquement. Au titre de « religion connue », il peut être librement pratiqué par les citoyens grecs. Ainsi en a décidé le tribunal de première instance d'Athènes en admettant la légalité des adorateurs des dieux de l'Olympe. Le Conseil national archéologique d'Athènes ne l'entend pas de cette oreille. « Demander un tel usage de ces sites deux mille ans après, c'est un peu tard ! » ironise l'un de ses membres. L'Église orthodoxe grecque n'est pas moins furieuse. Elle demande au gouvernement de faire preuve de plus de rigueur. Mais dans la presse nationale, la polémique enfle.
500 000 adeptes dans le monde
Nicolas Markoulakis est venu de Londres afin de célébrer, avec les siens, la déesse Héra. « Si cette polémique prend de l'importance en Grèce, c'est que le sujet est plus vaste », explique-t-il. En effet, dans le débat, revient la question sensible de la liberté religieuse et du poids de l'Église dans un pays où 97 % des habitants se disent orthodoxes. « L'Église de Grèce est très puissante et empêche toute autre religion de s'étendre, poursuit Nicolas. Dans les écoles, les cours d'instruction religieuse orthodoxe sont obligatoires. Nous demandons simplement le droit d'exercer les rites antiques en toute liberté, c'est tout ! »
Le retour aux croyances antiques n'est pas un phénomène récent. Il serait réapparu à la fin du XVIIIe siècle avec l'arrivée d'écoles archéologiques venues faire des fouilles en Grèce. Sous l'influence allemande, ce culte devient une mode sur tout le continent européen en 1825. Il connaît son apogée en 1896 avec le renouveau des Jeux olympiques, aboli par l'empereur Théodose en 394. Aujourd'hui, on dénombre près de 500 000 adeptes à travers le monde. S'ils ont édifié un temple aux États-Unis, ils restent très divisés entre eux. C'est pourquoi l'association Ellinaïs a pris l'initiative de les regrouper et d'en appeler aux instances européennes pour défendre leur liberté de penser sur tous les sites archéologiques en Grèce.
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