08/02/2011
Coupé du monde, les pieds sur terre
Sans qu’il se fût agi d’une résolution de ma part, je ne partageais plus le fruit de mes réflexions avec les hommes de mon temps. Naufragé sur une île, je vivais dans l’intimité avec moi-même et cultivais sans relâche le jardin secret de mon esprit, libre comme une âme de germain. Une âme belle comme une statue grecque, regardant la mer sur la grève éblouie par le soleil écarlate. Il n’était pas là question d’opinions. La raison était autrement plus profonde. C’était une question de caractère, de force d’âme, de sensibilité née. Rien ni personne, à ma connaissance, ne possédait le cœur assez ferme pour supporter le battement tumultueux de mon idéal sublime, sans se laisser pervertir par la loi inquisitrice et le canon mortifiant d’un enseignement dominant. Chez la plupart de mes contemporains oublieux, les émotions venaient de l’extérieur. Etablis sur de fébriles fondations, l’empire qu’ils avaient sur eux-mêmes faisait l’objet d’un coup d’état permanent. En leur intimité fondatrice, le mortier de leur âme s’évertuait à élever le mur qui les séparait d’eux-mêmes. Au fond d’eux-mêmes, aucune ascèse n’était possible. Juste une construction de l’esprit commune à tous les figurants d’une course au titre. Juste un logiciel téléchargé de clichés sensibles, gratuit pour tous. A quoi bon ouvrir une porte à qui n’a pas envie d’entrer.A quoi bon faire vibrer la corde sensible d’une âme sans caisse de résonnance. Le cœur n’y était pas. A quoi bon leur parler. Leur faire entendre ce qui échappe à la raison. Avaient-ils seulement idée du fossé qui les séparait de l'émotion qui bouleverse tous les clichés auxquels ils sont attachés? Avaient-ils seulement idée qu'à chaque pulsation de vie, il fallait avoir l’âme bien accordée pour s’entendre jouer de la lyre d’Apollon?
Mais me direz-vous, quel gage nous apportes-tu de ton excellence ? As-tu quelque assurance à nous apporter qui justifierait que tu te reconnaisses de si fortes altérités par rapport à tes semblables ?
Regarde ce blog. Je mets en ligne toutes mes créations, toutes mes émotions. C’est à la fois tout pour moi, et rien car je ne suis rien à mes yeux tournés vers d’autres statues. Ceux qui n’ont d’autres statues qu’eux-mêmes peuvent bien me plaggier contre mon gré, je n’en serai que conforté dans cette opinion que l’essentiel chez eux est absent chez moi.
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